L'épopée du buveur d'eau (qui voulait boire autre chose que de l'eau, justement!)
En même temps, six semaines sans alcool, c’était décourageant, comme perspective . Seul moyen d’échapper à cette condamnation, la fuite .
Il y avait la solution « je prends un billet air France, je vais à Paris et retour, en 24H, et je profite des petites bouteilles de vin blanc de l’avion ». Solution perdant-perdant : douloureux pour la carte bleue, mais insatisfaisant pour moi aussi, puisque le capital bien-être apporté par le vin blanc aurait été en temps réel annihilé par l’angoisse que génèrent les voyages en avion.
Nous avons donc retenu l’option « je quitte le pays en voiture et je me rends dans un Etat où l’alcool n’est pas prohibé » .
Nous nous sommes donc équipés d’un véhicule ad hoc, approuvé par les plus éminentes des organisations qui sillonnent le désert :
Et nous sommes partis ; notre objectif se trouvait à 300 km de la Black City, juste à droite en sortant du Sahara .
L e trajet ne nous parut pas trop long, le décor suffisant largement à occuper notre esprit :
Au bout de 160 km (c’est précis, car ici, pas de panneaux indicateurs, il faut se bricoler soi-même l’itinéraire en repérant les distances sur la carte et en les calculant avec le compteur de la voiture..d’un autre côté, il n’y a que 4 routes dans le pays, ça limite les risques d’erreur), nous avons quitté le goudron pour la piste :
Après une heure de secousses qui nous ont transformés en 4 bouteilles d’Orangina, heure néanmoins égayée par le spectacle des flamands roses et des phacochères, nous avons fait halte pour un pique-nique à l’un des nombreux postes de police du parcours ; les policiers nous ont prêté une natte pour que nous puissions nous asseoir, en échange de cachets d’aspirine pour leur mal de dents : là, c’était gagnant-gagnant.
Je suis la reine des pique-niques qui ne donnent pas envie de s’attarder : de la nourriture austère et en quantité très modérée, voilà le secret d’une pause méridienne menée tambour battant ! Si l’on ajoute à cela la chaleur ambiante, il ne nous a pas fallu plus de 12 minutes pour repartir.
Malgré cette efficacité, nous avons atteint la frontière au beau milieu de l’heure de la pause, doublée de l’heure de la prière du vendredi. De quoi mettre les policiers et douaniers de mauvaise humeur…Bons princes,ils s’en sont tenus à quelques remarques, et ne nous ont pas bloqués pendant les trois heures de ladite pause, heureusement..
Le poste de douane est aussi austère qu’un de mes pique-niques, on peut le mesurer sur ces photos :
Le marché public des panneaux indicateurs a visiblement été remporté par une entreprise locale:
Les services de change n’en sont pas moins assurés .
Le clou du spectacle de ce poste frontière, pour moi, fut l’apparition d’un diplodocus modèle réduit, dans les deux mètres de long (je n’avais pas encore bu, hein !) entre les deux fourgonnettes du fond : un de ces fameux varans qui glacent les côtelettes du touriste hagard (pas de photo du varan)
Mais j’ai eu tôt fait d’oublier ces inquiétantes bestioles, en découvrant notre destination, laquelle incarnait exactement ce que nous étions venus chercher :
Notre hôtel s’est révélé être exactement celui qu’il nous fallait ; je l’avais choisi en raison des illustres hôtes qui y étaient descendus (Jean Mermoz , qui décollait d’ici lors de ses vols transatlantiques, et Eddy Mitchell, lors du tournage de « Coup de torchon ». Des références un peu datées, mais l’établissement ne semble pas avoir beaucoup changé depuis.)
La terrasse de notre chambre offrait une vue à 360° ou presque sur les toits de cette ancienne capitale de l’Afrique occidentale Française.
Le retour fut moins idyllique, notamment pour Lucille ; à cinq heures du matin le dimanche, elle a traversé notre chambre au pas de course pour atteindre les toilettes juste à temps pour y vider ses tripes ; s’en est suivi le schéma classique pour elle du trajet en voiture agrippée à son sac poubelle, vomissant dedans à cadence élevée un liquide jaunâtre et plutôt inodore (pratique pour l’entourage, dans une voiture climatisée) ; variante notable pour cette fois, les vomissements ont bientôt été accompagnés de la phrase « j’ai envie d’aller aux toilettes », dite sur un ton ne laissant place à aucun doute quant à l’urgence de la requête. L’occasion de faire des photos du décor : on notera à quel point la signalisation est semblable à celle que nous connaissons en France !
Le tourisme gastrique a rythmé la matinée jusqu’à l’entrée dans la Black city, où nous avons eu droit au mythique « maman, j’ai vomi dans ma culotte ! », qui n’en finit pas, aujourd’hui encore, de nous faire ricaner..Notre première halte fut pour le Racing, où nous avons déjeuné, cependant que Lulu prolongeait les festivités, coincée dans les toilettes (je disposais fort heureusement d’un change complet pour elle).
Une bien belle virée, en somme !